L’Oeil, le goût, le flair: les compétences sensorielles du collectionneur fin-de-siècle - Université Rennes 2 Accéder directement au contenu
Article Dans Une Revue Sociétés & Représentations Année : 2017

L’Oeil, le goût, le flair: les compétences sensorielles du collectionneur fin-de-siècle

Résumé

Lié à l’enthousiasme suscité par les objets anciens et exotiques, l’engouement pour la collection a pris une ampleur considérable au cours de la seconde moitié du xixe siècle, de sorte que celle-ci occupe une place notable dans les écrits sur l’art, la presse et la littérature de cette période. Son avènement s’est accompagné de l’émergence, dans le domaine des arts et de l’histoire, de la figure archétypale du collectionneur, dont on rencontre de nombreuses représentations iconographiques, mais qui se dessine aussi à travers les fictions dont il est le protagoniste, les éloges funèbres, les guides et les catalogues qui lui sont destinés. Tout d’abord présenté comme un excentrique, moqué pour la dévotion maladive avec laquelle il s’adonne à sa manie, le collectionneur perd son caractère marginal au début de la Troisième République. Apparaît alors la figure du collectionneur idéal, véritable modèle, immanquablement doté d’une érudition conséquente, d’un goût sûr, mais aussi, et surtout, doué de flair. En faisant du flair un lieu commun associé aux compétences du collectionneur, les auteurs confirment une nouvelle acception du terme, signalée pour la première fois par Littré en 1874, exemplifiée par cette assertion : « Il y a des antiquaires qui ont du flair. » L’acception figurée du terme, qui associe l’odorat du chien, la finesse (délicatesse des sens) et l’intuition, fait intervenir dans le domaine des arts et des objets anciens un sens réputé bas, dans sa dimension la plus animale, en lui conférant, paradoxalement, l’allure d’une qualité. Bien que la métaphore lexicalisée du flair ait aujourd’hui perdu de son étrangeté, la nouveauté et l’ampleur de cette intrusion de l’odorat, au xixe siècle, dans un domaine traditionnellement dominé par la vue et le goût, pose question. Le flair, devenu une « expression consacrée » pour qualifier les compétences du collectionneur fin de siècle, offre une perspective singulière sur cette figure ainsi que sur la spécificité de son savoir sur les arts et l’histoire, mais il révèle aussi les mutations à l’œuvre dans le modèle sensoriel du xixe siècle.
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Citer

Érika Wicky. L’Oeil, le goût, le flair: les compétences sensorielles du collectionneur fin-de-siècle. Sociétés & Représentations, 2017, 44 (44), ⟨10.3917/sr.044.0151⟩. ⟨hal-01629700⟩
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