Le Théâtre de la Révolution de Romain Rolland, qui comporte huit pièces, composées entre 1898 et 1938, forme un des rares exemples d’œuvres théâtrales traitant de l’épisode révolutionnaire français. L’enjeu de notre communication est d’examiner en quoi l’étude de la structure et de la composition de ce vaste cycle permet d’explorer la représentation du temps historique et l’ubiquité phraséologique du concept de Révolution. Après s’être engagé au tournant du XIXe siècle et du XXe siècle en faveur des valeurs républicaines que menaçaient l’Affaire Dreyfus et la montée des nationalismes, après s’être défini comme « compagnon de route » de l’URSS de Staline, Romain Rolland prend peu à peu ses distances avec un régime politique, qui, porté par la révolution bolchevique, évolue progressivement vers une dictature. L’écriture du Théâtre de la Révolution témoigne des infléchissements politiques de son auteur, de ses espoirs et de ses doutes quant à la capacité, pour un État, d’entretenir les valeurs de transformation sociale et politique d’un phénomène révolutionnaire. Ainsi, alors qu’au XVIIIe siècle, le concept de révolution acquiert le sens de « bouleversement », de « rupture », le cycle rollandien semble s’inscrire dans l’acception ancienne du terme, entendue comme une « rotation », un mouvement circulaire, qu’il s’agisse du mouvement naturel des astres ou des cycles de formes constitutionnelles qui alternent et se relaient . De la monarchie à l’ochlocratie, le temps historique, chez les Anciens, se répète à l’infini. Le Théâtre de la Révolution de Rolland, par le sens tragique de certaines pièces, porte les réminiscences d’une conception fataliste du temps historique, qui trouve sa source dans le parcours politique de son auteur et justifie une écriture du cycle par analogie.